Un juge ordonne à la Flandre de suspendre tout transit de matériel militaire vers Israël

Une cargaison de matériel militaire (roulements à rouleaux coniques) destinée à l’entreprise israélienne de défense Ashot, interceptée au port d’Anvers, ne pourra en aucun cas quitter ce port. De plus, le tribunal de première instance de Bruxelles a ordonné jeudi au gouvernement flamand de bloquer tout transit de « produits liés à la défense et autres matériels à usage militaire, pour lesquels il n’existe aucune garantie matérielle qu’ils soient destinés exclusivement à un usage civil ». Cette décision est assortie d’une astreinte de 50 000 euros par infraction. Le gouvernement flamand a décidé de faire appel.


Quatre associations — Vredesactie, INTAL, 11.11.11 et la Ligue des droits de l’Homme — avaient saisi la justice après qu’un conteneur contenant trois palettes de roulements à rouleaux coniques ait été stoppé dans le port d’Anvers, à la suite d’une alerte de Vredesactie. Ces roulements seraient destinés à Ashot, une entreprise israélienne qui les utilise dans la fabrication des chars Merkava et des véhicules blindés Namer, déployés quotidiennement par l’armée israélienne dans la bande de Gaza. Selon les ONG, cinq navires par mois transitent entre Anvers et Israël, transportant potentiellement du matériel militaire.

Les plaignants reprochent au gouvernement flamand de ne pas contrôler suffisamment ce transit de matériel à usage militaire et de ne pas intervenir avec assez de rigueur. Ils affirment que laisser passer ce matériel via le port d’Anvers constitue une violation non seulement de la législation flamande sur le commerce des armes, mais aussi du droit international humanitaire.

Le tribunal de première instance de Bruxelles examinait ce jeudi l’action en référé introduite contre le gouvernement flamand par la Ligue des droits humains, Vredesactie, 11.11.11. et Intal, notamment.

Le tribunal a donné raison aux ONG. Selon lui, les craintes des plaignants sont fondées, notamment en raison des violations répétées du droit international par le gouvernement israélien depuis le 7 octobre 2023, mises en lumière par l’ONU et la Cour internationale de justice. Ces violations concernent le droit international humanitaire, le droit de la guerre et la Convention sur le génocide.

C’est une victoire historique Jo Dirix, Vredesactie vzw


« C’est une victoire historique », réagit Jo Dirix, de l’asbl Vredesactie, à notre rédaction. « Il existait déjà une réglementation interdisant à notre pays d’exporter des pièces d’armement vers Israël, mais ces marchandises militaires étaient tout de même expédiées via le port d’Anvers-Zeebruges. »

« Le juge affirme très clairement que la Flandre a une responsabilité à cet égard et doit empêcher le transit de ces marchandises. Elle doit désormais s’y conformer sous peine d’une astreinte. Même si nos décideurs politiques détournent le regard, nous devons, en tant que citoyens, assumer nos responsabilités », conclut Jo Dirix.

Le gouvernement flamand fait appel de l’ordonnance de référé


Le gouvernement flamand fait appel de l’ordonnance de référé rendue jeudi par le tribunal de première instance de Bruxelles. Au passage, le ministre-président Matthias Diependaele (N-VA) se montre particulièrement acerbe sur la décision de justice.

« Le jugement est loin de la réalité. Il semble partir d’une défiance à l’égard de l’autorité, comme s’il fallait une astreinte pour que nous fassions ce qu’il faut. Ce n’est pas seulement injustifié, c’est aussi du mépris pour l’engagement professionnel de nos services », vitupère le chef du gouvernement flamand. Il note que le conteneur en question a déjà été bloqué à titre préventif, avant même la procédure judiciaire, dans l’attente d’une enquête menée par le service de « contrôle des produits stratégiques ».

Selon lui, chaque signalement fait l’objet d’une enquête minutieuse « et lorsque nous trouvons du matériel militaire destiné à un conflit armé, nous l’arrêtons de facto ». « Nous n’avons pas besoin d’une décision de justice pour cela. L’idée que le gouvernement flamand négligerait ses obligations ou contribuerait délibérément à des violations des droits de l’homme est infondée. »

Selon le ministre-président, le juge a imposé au gouvernement flamand un devoir d’agir « même dans les cas où la loi ne l’autorise pas ». « C’est un précédent dangereux. En tant que gouvernement, nous ne pouvons et ne devons pas agir sans base légale », a souligné M. Diependaele.

Les quatre ONG à l’origine de la procédure en référé ont jugé l’appel du gouvernement flamand « scandaleux » et se sont montrées confiantes pour la suite. Elles dénoncent à nouveau une inaction des autorités dans la mise en œuvre des législations sur les armes.

Par Eric Steffens (publié le 17/07/25)

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