Une étude démontre les effets positifs d’une semaine à quatre jours de travail sans baisse de salaire, qui permet une amélioration de la santé physique et mentale, tout en travaillant de façon plus efficace.
L’idée n’est certes pas à l’ordre du jour de nos dirigeants, plus enclins à supprimer des jours fériés qu’à envisager une réduction du temps de travail. Mais dans le monde académique, la semaine de quatre jours fait son chemin, prouvant ses vertus à chaque nouvelle étude. La dernière en date, publiée le 21 juillet dans la revue Nature Human Behaviour, enfonce le clou. Ses auteurs montrent que les semaines de travail de quatre jours — sans réduction de salaire — améliorent la satisfaction professionnelle et la santé physique et mentale des employés.
Cette étude, réalisée par quatre chercheurs du Boston College et de l’University College de Dublin, a été menée pendant six mois sur 2 896 employés répartis à travers 141 organisations en Australie, au Canada, en Nouvelle-Zélande, au Royaume-Uni et aux États-Unis, des pays connus pour le niveau élevé de stress de leur population salariée. Ces entreprises se sont toutes portées volontaires pour tester la semaine de quatre jours. Leurs employés ont vu leur temps de travail diminuer en moyenne de cinq heures par semaine (parfois plus), pour un salaire maintenu au même niveau.
Plus d’efficacité et moins d’épuisement
Les chercheurs ont évalué leur état avant et après cette expérimentation grâce à des questionnaires. Leurs résultats ont été comparés avec ceux d’un groupe de contrôle de 285 salariés travaillant dans 12 entreprises où l’organisation du temps de travail n’a pas évolué.
Résultat : le bien-être des employés s’est globalement amélioré dans toutes les organisations où le temps de travail a été réduit. Cette tendance « n’a pas été observée dans les entreprises du groupe “contrôle” », signalent les chercheurs. La fatigue et les troubles du sommeil des salariés passés à la semaine de quatre jours ont diminué. Ceux dont le temps de travail a été réduit de huit heures ou plus par semaine ont observé une baisse importante de leur épuisement professionnel.
L’efficacité au travail des salariés, elle, a augmenté. Cette réorganisation du temps a entraîné « de profonds changements dans l’expérience professionnelle, améliorant le sentiment individuel et collectif des travailleurs quant à la qualité de leur travail », notent les chercheurs.
C’est l’un des points les plus surprenants de cette étude : loin de condamner les organisations testées à l’immobilité, la réduction du temps de travail semble « inciter les travailleurs à s’adapter collectivement et à optimiser leurs flux de travail ». Le temps consacré à des activités « à valeur ajoutée faible ou inexistante », comme par exemple les réunions « inutiles », a fortement diminué. De quoi inspirer les défenseurs de l’optimisation et de la « simplification » à tout-va.
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Quelques limites à cette étude : elle ne porte que sur des organisations volontaires et de petite taille (parmi lesquelles se trouvent un grand nombre d’ONG et de services sociaux) dans des pays à hauts revenus. Cela rend difficile toute généralisation, précisent ses auteurs. Les salariés auraient également pu être tentés de remplir leurs questionnaires en exagérant les bénéfices ressentis, dans l’espoir de voir leurs employeurs poursuivre l’expérimentation une fois l’étude terminée.
Équilibre entre vie privée et vie professionnelle
Ces résultats confirment cependant ceux d’autres chercheurs. Entre 2015 et 2017, une expérimentation de la semaine de quatre jours a été menée au sein des services publics islandais. Les 2 500 fonctionnaires qui ont bénéficié de cette réorganisation du temps de travail ont déclaré être moins stressés et moins épuisés que ceux n’en ayant pas bénéficié. L’équilibre entre leur vie professionnelle et leur vie privée était également meilleur, selon leurs dires. Leur productivité est restée la même, voire s’est améliorée.
Des résultats similaires ont été obtenus dans le cadre d’une étude menée en Belgique, en 2019, sur 60 employés passés à la semaine de trente heures.
À l’inverse, il existe une littérature scientifique abondante sur les risques associés aux trop longs temps de travail : taux plus élevés de maladies cardiovasculaires, de diabète et de douleurs chroniques, détresse psychologique… Les personnes qui travaillent plus de cinquante heures par semaine ont également tendance à manger davantage de fast-food et à faire moins d’exercice.
Lors de la présentation de son projet de budget pour 2026, le Premier ministre, François Bayrou, estimait qu’il n’y avait « aucune raison acceptable » de ne pas faire travailler plus les Français. Il y en existe peut-être au moins une : la préservation de leur santé.
Par Hortense Chauvin (publié le 21/07/25)