La justice belge se penche ce mardi sur l’assassinat de l’ancien Premier ministre congolais Patrice Lumumba en 1961. Après plus de dix années d’enquête, la chambre du conseil de Bruxelles entame le traitement du dossier afin de décider si un procès doit avoir lieu ou non. La RTBF apprend que le parquet fédéral réclame un renvoi de l’affaire devant le tribunal correctionnel. Le parquet souhaite qu’un procès se tienne pour « participation aux crimes de guerre ». Étienne Davignon serait alors le seul à être jugé.
Patrice Lumumba, principale figure de l’indépendance, a été assassiné le 17 janvier 1961, avec deux de ses plus proches collaborateurs. Devenu Premier ministre du Congo le jour de l’indépendance, le 30 juin 1960, Patrice Lumumba est révoqué dès le mois de septembre, puis arrêté et transféré au Katanga, où il trouve la mort. La Belgique est à l’époque lancée dans une guerre coloniale et soutient la sécession du Katanga minier.
Une commission d’enquête parlementaire belge avait conclu en 2001 que « certains membres du gouvernement belge et d’autres acteurs belges avaient une responsabilité morale dans les circonstances ayant mené à sa mort ».
En 2022, le gouvernement a présenté ses excuses pour la manière dont la Belgique a pesé sur la décision de mettre fin aux jours du 1er Premier ministre du Congo.
Néanmoins, de nombreuses zones d’ombre subsistent concernant les responsabilités dans les événements qui ont conduit à l’assassinat.
« Crime de guerre »
Une enquête pénale a été ouverte en Belgique à la suite d’une plainte déposée en 2011 par la famille Lumumba.
Cette instruction judiciaire est désormais bouclée et le parquet fédéral réclame un procès devant le tribunal correctionnel pour « crimes de guerre » ; plus précisément pour détention et transfert illicite d’un prisonnier de guerre, pour l’avoir privé du droit d’être jugé de manière impartiale et pour lui avoir fait subir des traitements humiliants et dégradants.
Parmi les dix personnalités belges visées par la plainte initiale, seul Étienne Davignon est encore en vie. Diplomate, ministre d’État, homme d’affaires et ancien vice-président de la Commission européenne, il est âgé de 92 ans.
Étienne Davignon, 92 ans, seul encore en vie.
Au moment de l’indépendance du Congo et de l’écartement du pouvoir de Patrice Lumumba, le diplomate stagiaire Étienne Davignon avait été envoyé dans la région par le ministère des Affaires étrangères. Interrogé déjà par la commission d’enquête parlementaire, il n’a cessé de nier toute implication des autorités belges dans l’assassinat.
Sollicité par la RTBF, l’avocat d’Étienne Davignon ne souhaite pas s’exprimer sur la demande de renvoi du parquet, ni sur le fond de l’affaire. Il indique qu’il demandera un report ce mardi à la chambre du conseil, « le temps de pouvoir examiner ce dossier très volumineux ».
En 2022, la dépouille de Patrice Lumumba – une dent de l’ancien Premier ministre saisie par la justice – avait été rendue à la famille par les autorités belges. La dépouille a ensuite été rapatriée à Kinshasa, en République démocratique du Congo.
Par Sébastien Georis et Fabien Van Eeckhaut (publié le 16/06/25)