La Cour d'appel fédérale renverse l'approbation de l'oléoduc Northern Gateway
La Cour d'appel fédérale conclut que le gouvernement canadien a failli à son obligation de consulter les Autochtones avant de donner son feu vert au projet d'oléoduc Northern Gateway, qui doit acheminer le pétrole bitumineux de l'Alberta vers la côte ouest.

Dans une décision écrite rendue le 23 juin, mais dévoilée jeudi par les avocats d'une des parties, la Cour d'appel annule donc l'approbation donnée par Ottawa au projet d'oléoduc de la société Enbridge, de Calgary.

Deux des trois juges ont estimé que le gouvernement fédéral avait omis de discuter d'enjeux d'une importance cruciale pour les Premières Nations, en ignorant plusieurs impacts de l'oléoduc.

Le projet d'Enbridge, un investissement de 7,9 milliards, avait été approuvé par le gouvernement conservateur de Stephen Harper en 2014, mais il était depuis en suspens dans des limbes juridiques. Huit communautés des Premières Nations, quatre organisations environnementales et un syndicat avaient contesté la décision d'Ottawa, et la cause a été entendue en Cour d'appel fédérale en octobre dernier.

Le bureau du ministre fédéral des Ressources naturelles, Jim Carr, a indiqué que le ministère prendrait le temps nécessaire pour étudier la décision avant de déterminer quelles seront les prochaines étapes, s'il y a lieu.


«Le gouvernement du Canada est déterminé à entretenir une relation renouvelée, nation à nation, avec les peuples autochtones, appuyée sur une reconnaissance des droits, le respect, la coopération et le partenariat, incluant notre devoir de consulter», peut-on lire dans la déclaration.

Le juge dissident, Michael Ryer, estime que les Premières Nations ont été encouragées à donner leur avis, et que le gouvernement a même offert son aide financière pour ce processus de consultations. Par ailleurs, plusieurs préoccupations des Autochtones ont été prises en compte dans les 209 conditions imposées au promoteur par la Commission mixte d'évaluation environnementale, écrit le juge dissident. Cette commission avait conclu en décembre 2013 que le projet était d'intérêt public.

Le juge Ryer rappelle aussi que le projet d'Enbridge a reçu l'appui d'une majorité de communautés autochtones touchées - 26 d'entre elles ont accepté le passage de l'oléoduc, en échange de titres de capitaux propres dans l'entreprise.

Le président de Northern Gateway, John Carruthers, a précisé dans un communiqué que la compagnie était déterminée à construire «cette importante infrastructure canadienne» tout en protégeant l'environnement et les valeurs traditionnelles des peuples autochtones. La compagnie consultera maintenant ses partenaires des Premières Nations et ses promoteurs commerciaux avant de décider de la suite des choses.

L'oléoduc Northern Gateway, soumis pour la première fois à l'Office national de l'énergie en 2005, permettrait d'acheminer, sur 1000 km, du pétrole des sables bitumineux albertains vers le port de Kitimat, en Colombie-Britannique, pour exportation à l'étranger. Un oléoduc parallèle acheminerait en direction opposée 193 000 barils par jour de diluant pour pétrole brut.

Le premier ministre Justin Trudeau avait promis en campagne électorale de pérenniser l'interdiction des pétroliers sur la côte nord de la Colombie-Britannique, ce qui pourrait sonner le glas du projet Northern Gateway. M. Trudeau s'oppose aussi au passage d'un oléoduc dans la forêt tropicale de Great Bear - la trajectoire projetée pour Northern Gateway.

Le jugement de la Cour d'appel fédérale est daté du 23 juin et il n'a pas été publié sur le site internet de la cour, mais il a été dévoilé jeudi par le cabinet d'avocats JFK, qui représente une des Premières Nations impliquées dans la contestation.

A lire sur affaires.lapresse.ca (30/06/2016)