À Londres, un collectif d’artistes rend les pics anti-SDF plus confortables
Le collectif d’artistes londonions Space, Not Spikes installe des lits de fortune pour que les SDF puissent se réapproprier l’espace public qui leur est trop souvent hostile.

Les sans-abris sont de plus en plus nombreux. Selon la fondation Abbé Pierre, 100 millions de personnes sont “en situation de fragilité par rapport au logement” et 30 000 enfants sont à la rue. En dix ans, le nombre de sans-abris a doublé. Et comme leur vie n’est apparemment pas assez dure, certains commerçants ont décidé de placer des “pics anti-SDF” devant leurs vitrines afin qu’aucun d’eux ne puisse s’y abriter. Ces dispositifs sont de plus en plus nombreux dans les grandes villes telles que Paris et Londres.

Un groupe d’artistes londoniens a décidé de contrer cette cruauté architecturale en transformant ces instruments de torture en petit coin cosy. Et grâce à eux, les gens qui n’ont pas la chance d’avoir un canapé ou d’être un fakir peuvent s’assoir sans s’empaler le séant.

Connu sous le nom de Space, Not Spikes (en français “de l’espace, pas de pics”), le collectif a confectionné des lits de fortune conçus spécialement pour se poser au-dessus de ces pics métalliques. Il a même placé une petite étagère contenant des livres au contenu approprié à la situation : développement urbain, architecture… de quoi se renseigner sur le sujet.

Space, Not Spikes souhaite démontrer que l’hostilité architecturale n’a pas sa place dans notre société, que ce soit par l’appropriation des lieux publics ou l’humiliation des sans-abris.

Le collectif déclare sur son site :

Ceux qui vivent dans une ville déambulent d’un endroit à l’autre sur des chemins rigoureusement définis. On nous dit où marcher, où s’assoir, où nous sommes les bienvenus mais seulement si on débourse de l’argent. Ou du moins, si on en a. Cela nous rend névrosés et engendre un sentiment d’isolation lorsque quelqu’un refuse ou n’est pas en mesure d’acheter ce qui semble indispensable à la société et aux loisirs.

Les pics anti-SDF font partie de cette invention. Rien ne dit “dégage” plus que des rangées de plugs anaux aiguisés disposées pour empêcher les gens de profiter ou d’utiliser un espace public.

Ils ajoutent :

Space, Not Spikes est né de la colère que nous ressentons face aux injustices de l’espace public et privé. Nous avons choisi d’agir dans le quartier du Curtain Road à cause de sa connexion avec le milieu artistique. Au coin de la rue et un peu plus loin se trouvaient les studios d’artistes parce qu’ils n’avaient pas les moyens de vivre et de travailler ailleurs. Ceux du night club Plastic People vivaient à cet endroit en particulier. À l’étage, il y avait un restaurant vietnamien qui était particulièrement animé durant les week-ends. Maintenant, nous avons des pics.

Nous cherchons désormais des pas de porte et des détails architecturaux qui laissent place aux “bonnes” personnes et gardent les “mauvaises” à distance. Les rue sont nôtres, indépendamment de ce que l’on possède ou du montant de son loyer.

Les pics anti-SDF sont inacceptables où qu’ils soient et qu’importe qui les place. Avec un peu de chance, les magasins qui les ont placés devant leurs devantures auront un regain d’humanité en voyant ce qu’il se passe lorsque les plus pauvres sont exploités et humiliés, et plus de lits de fortune seront mis en place sur ces pics pleins de haine.

Par Lydia Morrish

Lire sur www.konbini.com  (23/07/2015)