Pollution au Nigéria : Shell accepte d’indemniser des populations
L’action en justice intentée contre Shell au Royaume-Uni avait déjà permis de révéler l’étendue de la faute et de la négligence de la compagnie pétrolière qui, au courant des risques d’accidents et de l’ampleur des déversements d’hydrocarbures, avait préféré les minimiser. En obtenant du géant pétrolier le versement d’indemnisations financières, la population affectée remporte une victoire importante.


En août puis en décembre 2008, deux fuites dans les oléoducs de l’entreprise Shell provoquent le déversement de milliers de barils de pétrole brut et contaminent les sols et cours d’eau de la ville de Bodo, située dans le delta du Niger. Alors que la compagnie pétrolière nie sa responsabilité dans le déversement ainsi que son ampleur, l’absence d’intervention signifie que la pollution s’étend et détruit les moyens de subsistance, largement basés sur la pêche et l’agriculture, de milliers de personnes. Faute de mesures de dépollution et d’indemnisation, une partie de la population affectée connait alors une pauvreté accrue.

UN PROCÈS POUR OBTENIR LA VÉRITE SUR CE QUE SAVAIT SHELL

En 2011, les résidents de Bodo, soutenus par Amnesty International et le Centre pour l’environnement, les droits humains et le développement, engagent des procédures judiciaires au Royaume-Uni contre Shell. Les deux organisations fournissent alors à plusieurs reprises des preuves de l’ampleur et de l’impact de ces déversements, et montrent les failles de la procédure d’enquête diligentée par la compagnie. Pourtant, Shell persiste à dire que le volume de l’épanchement s’élève à environ 4 000 barils et que ces fuites sont principalement dues à des actes de sabotage et de vol.

Lire aussi : Mensonges de Shell sur les déversements d’hydrocarbures au Nigeria : notre point sur l’affaire

C’est uniquement dans le cadre de cette procédure judiciaire que le géant pétrolier a enfin admis en novembre 2014 que ces chiffres étaient faux et que la quantité de pétrole déversée avait été largement sous-estimée. Cependant, Shell n’a toujours pas confirmé le volume qui s’est véritablement déversé, Amnesty International estime que celui-ci dépasserait les 100 000 barils.

Des documents internes ont aussi révélé que la compagnie pétrolière savait depuis au moins 2002 que la plupart de ses oléoducs étaient anciens et que certaines sections présentaient « un risque et un danger majeurs »

LA RESPONSABILITÉ DE SHELL NE DOIT PAS S'ARRÊTER AU VERSEMENT D'INDEMNITÉS

L’arrangement amiable d’une indemnisation de 55 millions de livres sterling (soit près de 70 milllions d’euros) conclu entre Shell et la communauté de Bodo représente donc une victoire importante pour ceux qui ont subi la négligence de la compagnie : 35 millions de livres  seront versés à 15600 personnes à titre individuel et les 20 millions restants iront à la collectivité.

Mais ce pas en avant reste insuffisant tant que Shell ne nettoie pas les zones polluées et ne répare pas ses oléoducs délabrés. La pollution pétrolière dans le delta du Niger est l’un des pires scandales industriels au monde et il est temps que les compagnies impliquées prennent de véritables mesures pour prévenir les accidents et assument la responsabilité de leurs actions ainsi que de leur inaction.

Lire sur le site d'Amnesty International France (08/01/2015)