L’Allemagne reconnaît le troisième genre
L’Allemagne reconnaît désormais officiellement l’existence d’un troisième genre. Ni masculin, ni féminin, le sexe « indéterminé » concernera les milliers de personnes qui naissent chaque année sans détermination sexuelle.

L’Allemagne est le premier pays européen qui reconnaît l’existence d’un troisième genre. Dès le 1er Novembre, les nourrissons pourront avoir la mention « sexe indéterminé » inscrite sur leur certificat de naissance, rapporte lundi 19 août le Guardian. Cette décision s’appliquera aux bébés intersexués qui présentent une ambiguïté sexuelle provenant d’une anomalie dans le déterminisme des gonades (testicules et ovaires). Selon Le Monde , en Europe un nouveau-né sur 5 000 est concerné.

Un sexe impossible à déterminer
Derrière ce troisième genre « hermaphrodite » se cache une maladie des glandes surrénales. Celles-ci fabriquent plus d’androgènes que nécessaire, ce qui a pour conséquence de viriliser les embryons féminins. Les individus concernés par l’intersexualité ont souvent des organes génitaux masculins et féminins, mais qui présentent des particularités (pénis atrophié, absence d’utérus, vagin de très petite taille…). Outre ces distinctions physiques, leur sexe est également impossible à déterminer de façon univoque au niveau génétique. Le développement chromosomique suit une trajectoire atypique, et ne permet pas d’attribuer clairement un sexe à la personne.

La plupart du temps, les médecins décident d’attribuer un sexe à l’enfant le plus tôt possible. Cela nécessite de faire des opérations afin de « supprimer » les marqueurs du sexe qui a été condamné. En général, le sexe féminin est privilégié, il est en effet plus facile de « corriger » l’anatomie d’un enfant dans ce sens. Plusieurs associations de défense des droits des intersexués militent pour que ces interventions ne puissent plus être pratiquées à la naissance. Elles estiment qu’il est nécessaire d’attendre que le patient ait atteint un âge où il puisse décider lui-même de son sexe.Leur cause a récemment été ralliée par le Conseil de l’Europe , l’ONU (qui a rangé les mutilations génitales sur les enfants intersexes dans la liste des tortures) et Amnesty International. Les opérations que subissent ces enfants, souvent couplées avec de lourdes prises d’hormones synthétiques, ne sont en effet pas sans conséquences. Le site Apache.Be rapporte les propos de Kris, déclaré de type féminin mais qui n’a jamais été à l’aise avec cette identité. Il a subi une série d’opérations tout au long de sa croissance, et explique qu’il en « veut au corps médical qui fait d’enfants en bonne santé des enfants malades ». Il dénonce ces opérations qui, dit-il, entraînent quasi systématiquement la stérilisation et induisent une perte de sensibilité et de plaisir à l’âge adulte.

Ouvrir le droit à l’autodétermination
La décision de l’Allemagne est importante car elle ouvre une reconnaissance juridique à la diversité sexuelle et biologique. Berlin se base sur un avis de la Cour Constitutionnelle qui estime que le genre ressenti et vécu est un droit humain de base. Jusqu’à présent, le système juridique n’admettait que l’existence des deux sexes, et forçait donc les parents à « choisir » s’ils avaient donné naissance à une fille ou à un garçon. Désormais, les personnes intersexes auront la liberté de décider elles-mêmes de la nature de leur identité. Elles pourront à tout moment changer d’identité sexuelle ou bien choisir de rester de sexe « indéterminé » tout au long de leur vie. Quelques pays, tels que l’Australie , reconnaissent légalement l’intersexualité. L’Allemagne est le premier pays d’Europe à franchir le pas. En ouvrant la porte d’un troisième genre, elle ouvre le droit à l’autodétermination.

Ecrit par Aurélia D'Hollander
Lire sur le site de lesoir.be (20/08/2013)